PROWELLER - Le Baiser

« C’est dans la couleur qu’il y a de l’espoir. »

Proweller, 1970

Emanuel Proweller, dit Proweller, est né en 1918 dans une famille juive de Lwow (alors en Pologne). Il poursuit des études d’architecture durant lesquelles il commence à peindre dans un style postimpressionniste. Seul rescapé de sa famille, il survit à l’extermination juive pendant la Seconde Guerre mondiale. En 1948, il choisit de vivre à Paris et peint des tableaux abstraits. Sa peinture est moderne. Le jeu des formes et des couleurs représentait une rupture avec le vieux monde, une utopie. Toutefois, à partir de 1953, il effectue un retour progressif à la figuration, déclenchant l’incompréhension du public et de la critique. Il s’installe à Créteil en 1959, puis dès 1965, se partage entre la région parisienne et l’Ardèche. Il faut attendre 1976 pour que son rôle de précurseur de la « figuration narrative¹ » soit reconnu. Il meurt le 25 décembre 1981.

Le retour à la figuration se fait à travers la représentation de scènes très quotidiennes de vie tranquille sous une forme très épurée : enfants, gens simples, fleurs et oiseaux, journées lumineuses, formes pleines et rondes, ou comme ici un couple qui s’enlace.

L’usage de la couleur et de formes simples tend à associer la peinture de Proweller au Pop Art. Rien ne serait plus faux. Si la figuration est centrée sur le quotidien, elle n’est pas au niveau d’une quelconque image standardisée à la manière des artistes Pop. Au contraire, son but est de révéler la force, l’impact que le quotidien possède. Là où le Pop Art met de la distance avec le réel, Proweller, lui, le saisit. Cette séquence de vie, un baiser, est déposée sur le tableau.

Les couleurs – le bleu, le jaune et le rouge orangé – construisent l’espace en dehors de toute perspective, tel un gros plan photographique, et suggèrent l’atmosphère d’un moment. Les deux figures sont composées de larges aplats où la couleur intervient pour structurer la forme.

Proweller peint pour dire merci à la vie, pour que l’espoir l’emporte sur le malheur.

1. La figuration narrative est un mouvement artistique apparu, principalement dans la peinture, au début des années 1960 en France, dans le cadre du retour à la nouvelle figuration et en opposition à l’abstraction et aux mouvements contemporains du nouveau réalisme et du pop art, auquel elle est néanmoins associée.

2. Pop Art : Courant contemporain des arts plastiques des années 1960 utilisant pour ses compositions des objets de la vie quotidienne et des images empruntées à la publicité, aux magazines, etc.